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Journal de l'autre bord
23 mai 2004

Petit poids - lardon

Un bon mètre septante-dix-huit.

Et même dit en helvète, cela devrait faire son poids. Et c'est bien là le problème...

Que faire de sa propension à s'offrir une bouée d'amour, au delà de soixante neuf kilos traditionnels, lorsque l'on tente la déraison jusqu'à ingurgiter un bout de fromage au repas ? Une tranche de coppa et un kilo de plus au petit réveil !?! Telle est ma condition injuste lorsque j'en viens à dépasser mon seuil d'acceptabilité.

Ma mère m'avait jadis prédit que j'en viendrais à regretter, un jour, de ne pas pratiquer une activité différente de mes habituels Légo d'enfant. Et ce n'est pourtant pas faute de m'avoir torturé le corps et l'esprit en m'envoyant, malgré moi, dans ma honte d'avant, à ces rendez-vous collégiens d'équipe de handball ou de basket, ces mercredis d'humiliation terrifiante, de solitude désemparée, où j'aurais tellement préféré regarder Vitamine et Karen Cheryl à la télé...

Je n'ai jamais su rattraper une balle correctement, est-ce ma faute à moi ? Pas même l'indépendant athlétisme pour sauver la mise, j'étais définitivement nul et inadapté dès l'instant où il me fallait bouger mes membres pour autre chose qu'assembler intelligemment mes précieuses briquettes chamarrées.

Alors, voilà : le temps a passé, j'ai grandi bonant malant, me suis allongé de manière acceptable, les épaules éventuellement assez larges, mais développant une chaire molle à en mourir. Ou pire, les mois d'excès, un tantinet adipeuse..

Bien entendu, dans ce culte du paraître qui fut tellement mien une adolescence durant, j'ai su camoufler ce désavantage par un port de mannequinat, le ventre constamment rentré, ces improbables abdominaux que je sollicitais à perpétuité pour retenir au mieux une excroissance disgracieuse, un arrondi de bonne famille, une marque d'une inopinée paternité de trentenaire trop bien installé dans son confort...

Le change fut parfait, véritablement bluffant, mon identitaire silhouette étant réputée svelte et élancée, mes efforts de nutrition sempiternellement taxés de stupides pour ce jeune homme tellement mince, tellement bien balancé dans ses vêtements. Car l'habit fait le moine dans de telles circonstances, on camoufle ses courbes sous des effets flatteurs, on s'astreint à des comportements corporels irréprochables et le tour est joué. Jusqu'à en devenir, à terme, déjoué. Tout s'évente et l'on se doit alors de le réinventer.

Est-ce une anorexie d'il y a encore si peu, est-ce un métabolisme modifié par le passage à l'âge indéniablement adulte, mais la parade ne suffit plus, le molleton s'installe plus sûrement que la misère en Inde et avec, mon inconfort, ma gêne devant mon miroir, mon embarras dans mes bras, ou dans l'étreinte amoureuse des siens, comme si ma révolue éternelle maigreur, mon collant gabarit de papier-peint, s'avérait être l'expression incontournable d'un esthétisme à l'irréprochabilité avérée.

Il me faudrait admettre définitivement que je ne peux être cet adolescent attardé ad vitam aeternam, qu'il me faudra compter désormais avec le temps et son affaire, celle qui délaisse ses splendeurs fallacieuse d'autrefois. Mais il y a une limite cependant que je ne veux franchir loin de ces jeunes mariés qui finissent par se moquer de tout, par ne plus s'astreindre à la séduction dans le regard de l'autre, sous prétexte que la routine, le collage solidement installé, est un curieux ciment à l'amour affirmatif d'un jour de gloire exprimé devant témoins.

Je n'ai pas la bague au doigt, c'est un fait, mais quand bien même, j'espère ne jamais sombrer dans ce déni de l'utilité du charme de sa personne, du minimum visuel  ou charmel à offrir à l'être aimé. Et en miroir, bien entendu, à soi-même.

Telle est la raison pour  laquelle je vais sombrer illico dans des plaisirs déshydratés de biafrais volontaire, de sachets protéinés en shaker plastique.

A table, donc !

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Commentaires
A
Tiens, un souci sur le web ?<br /> As-tu reçu mon message ,<br /> Merci,<br /> André
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