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Journal de l'autre bord
25 mai 2004

Le baiser de l'autel de vie

Ce sont de ces secondes qui me font peur.

Non que ce soit une humiliation en soi, et pourtant. Faire de ma bouche furtive dans son cou, dans l'eau aussi turquoise que glaciale d'un tardif printemps ensoleillé, un objet à cacher, voilà qui revêt pour moi les frusques d'un bête affront, point tant s'en faut de la part de mon conjoint que de celle d'une société contemplatrice. Ou un peu des deux, finalement.

Je n'ai pas exactement pour habitude de parader, du moins l'ai-je égarée depuis longtemps déjà. Et s'il me paraissait jadis envisageable d'afficher quelques unes de mes idées décalées, je sais par expériences interposées, par simple bon sens, ou par simple pudeur dans ma chair, qu'il ne serait pas exactement judicieux, ni même indispensable, d'obliger autrui à concrétiser du bout des cils ce que mon amour singulier induit de différences, barbe contre barbe et cheveux courts virilement emmêlés.

Pourtant, je ne suis pas exactement adepte à ce jour de l'adage qui nous supposerait tellement mieux cachés pour vivre une existence heureuse et follement cloîtrée. Loin de l'idée stérile de la provocation, je tiens encore en laisse ma bouche et mes ardeurs de tendresse dans ce petit monde tellement communautaire, ce petit bled du bout du monde, où l'un des sports favoris consiste à mater autrui à l'abri de ses persiennes pour mieux persifler l'instant d'après.

Il est bien évident, et indubitablement admis chez moi, que la couverture pas même mitée de l'anonymat d'une cité agirait fatalement comme un détonateur de liberté, de je m'en foutisme amoureux, que mon Ludo et moi pourrions assurément bénir. Seulement voilà, l'univers que je fréquente lui semble logiquement bien loin de ce paradis de la distance sociale. Et pas même une plage si peu bondée et tant touristique, certainement occupée par des échoués de vacances, loin des autochtones que nous pourrions croiser l'instant d'après, lui procure le sentiment que mon offrande inconsidérée du souffle de ma vie, celle qui bat pour lui, ce demi-dieu qui m'incendie, pourrait devenir une dévotion tolérable et point si folle devant une foule qui ne bade pas nécessairement l'intrus.

C'est là certainement une simple question de point de vue, de sensibilité, d'aise avec son mode de vie, et je serai parjure que d'exhiber ma pleine revendication de mes droits les plus fondamentaux dans un monde à peine préparé à négligemment côtoyer un amour inverti.

Mais je ne puis que m'interroger sur la cohérence de cette discrétion, supposée salutaire, chez une âme à l'amour tellement débordant qu'il souhaite positivement en faire profiter, un jour, des petites mains potelées, des couches culottes odorante du talc encore frais, un petit être (ou même plusieurs, qui le sait ?) tout dévoué à l'amour de ses deux papas éminemment fous de lui.

Car peut-on décemment se retenir d'endurer soi-même un regard quand on est prêt à l'imposer, fut-ce dans la pléthore de son amour filial le plus immense, à un enfant désarmé, soumis à l'inextricable cruauté de son copain de récrée ?

C'est encore une subtilité qui m'échappe, une de celle qui me donne à comprendre, que l'un dans l'autre, l'un avec l'autre, nous ne sommes pas encore suffisamment adultes pour tout assumer.

Les pleurs d'un môme, innocente victime d'un ostracisme indécent, aussi bien que ce chaud baiser à l'orée du cou, pas même volé dans un lagon ébloui...

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Commentaires
C
Je viens de découvrir ton blog et j'adore! J'ai lu les derniers posts et ai plusieurs fois ris, surtout dans celui où tu parles de tes rapports avec les kilos "p'tit pois - lardons" et alors l'autre sur le magazine que ton copain lit... Je suppose que ton but n'était peut-être pas de me faire rire, mais au moins d'éveiller un sentiment, quel qu'il soit, chez la personne qui te lit, ben chez moi, y en a eu plusieurs sur ces 10 minutes et il fallait absolument que je te le dises tout de suite. Envoi immédiat dans mes favoris ;-) Merci.
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