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Journal de l'autre bord
30 janvier 2005

J'aime pas Farmer (ou l'échappée belle)

J'ai essayé ; un effort pas réellement surhumain pour un auditeur volontairement occasionnel mais, en tout état de cause, au delà de mes forces que je voudrais un minimum culturelles. Désormais, c'est réellement acquis, si m'en croyez : je ne serai pas de ceux, je ne serai pas de ces aficionados ordinaires qui roucoulent devant Elle, un pédé lambda auquel j'échappe clair.

Mais il me fallait comprendre ce que l'égérie assumée des vieux concupiscents, des vicieux libidineux de tout âge, la prêtresse du mal de vivre adolescent, la Mylène fédératrice d'un milieu franco-homo, pouvait apporter comme émotion majeure à un individu normalement constitué ; j'ai nommé, moi, votre serviteur, spécimen encore jeune et délicieusement inverti !

Alors j'ai glissé le disque sur la platine, ce vidéogramme abandonné là, depuis belle lurette déjà, par l'homme de ma vie. Mais tel un Saint-Antoine flaubertien, je résistais inconsciemment depuis, histoire de, je le crois volontiers, ne pas sombrer peut-être plus avant dans un cliché que je m'en voudrais d'épouser. Fut-ce même via un PACS improvisé...

Ce divin soir, repus et saoulé à la vieille prune, j'attendis donc que l'insupportable Innamoramento en ait finit de dégouliner cinq minutes durant pour voir sortir d'un Buddha new-age Gigerisé, tel un improbable pois chiche d'une cervelle vide, la belle offerte, dénudée en mariée intouchable, acclamée telle la divinité salvatrice qui inspire ni plus ni moins que l'ensemble d'une génération. Ou de deux, au pire.

Mais qu'y trouver là, dans cette débauche de faisceaux laser à faire pâlir un Jean-Michel Jarre et son contrat exclusif avec EDF, que ressentir passées les premières minutes de l'insondable folie déifiante de ce public en furie, tout droit échappé d'un Marais exponentialisé ?

Moi, j'y ai vu une femme s'affligeant douloureusement d'un artificiel sourire, plutôt dirais-je de la subtile grimace d'un non moins délicat Joker de chez Batman, maquillée comme une mère maquerelle et coiffée telle une pute passée la bataille, cheveux filasses et carotte réglementaires, une femme forcément milliardaire qui s'efforçait d'hurler crescendo des textes que je suppose, avec quelques uns de mes critiques de pairs, volontiers ineptes.

Car c'est aussi bien de cela dont il s'agit, passées les quelques apartés hystériques à la voix haut-perchée, lorsque l'on arrive à cerner une pauvre moitié des lyrics azimutés, dans ces sphères sonores véritablement inaccessibles, l'on s'étonne de l'indigence toute évidente de cette prose de collégienne dépressive, de ces rimes tantôt légères tantôt infantiles, qui n'ont de cesse de conjuguer le sexe, la mort et le sang. Et ensuite, ma douce et tendre, et ensuite, que proposes-tu de novateur, d'authentique, de fort ?

Ensuite, l'indigence camouflée de sa présence scénique, des chorégraphies autodidactes mollassonnes, jeux de jambes affriolantes qui se répètent à l'envie devant un public ébaubi, des effets de regard figé, marketing de biche apeurée, bref, en un mot comme en cent, le vide, l'insupportable vacuité d'une artiste dont le seul génie est de durer. Et Dieu sait qu'elle dure, quand moi je ne sais véritablement pourquoi, tandis qu'elle chante peu ou prou depuis mes quatorze années la même mélodie du bonheur impossible, quatre miséreuses notes éculées au compteur, déclinées à l'infini sur tous les registres, photocopiés à l'envie, d'arrangements poussifs trop familiers en excès en tous genres, tel celui de la rareté divinement bien pensée.

Or tout ceci se fait sans honte aucune ; pas même celle du ridicule formaté, les pauvres et dérisoires larmes qui roulent, les sanglots qui s'étouffent en une chanson pathétique, le comble du miracle répété chaque jour, en soirée ou en matinée, pour une artiste, il est vrai, unique. Et heureusement, d'ailleurs...

Le ciment homo sera donc sans moi, tout hermétique que je demeure à une telle pléthore de sincérité inversée, loin de la présence magique et électrisante d'une autre chanteuse, pourtant elle aussi sans voix, la sublime Vanessa, qui à défaut de moyens débauchés, expose son âme sans artifices, son interprétation comme un don de soi, se gardant de singer ce que l'américaine de Ciccone sait faire mieux que personne. Mylène ne sera jamais Madonna, je crois. Et je garderai encore vraisemblablement longtemps mes petites idoles au chaud...

J'ai l'humeur un tantinet vipérine ce soir mais elle est à la hauteur de ma déception tant je m'étais imaginé, pour me l'entendre dire, que ce petit bout rouquin de femme fragile offrirait véritablement quelque chose de singulier, un show peut-être pharaonique mais animé par une âme et non par le simple appât évident d'un gain décuplé par le nombre de billets arrachés au comptoir de la Fnac.

C'est bien là pour moi ce à quoi j'échappe fièrement, une déclinaison identitaire de l'exploitation grégaire des foules, la flatterie soupesée, l'apanage d'un plan marketé comme le sol d'un appartement ancien.

Et n'oubliez pas les patins ! Faudrait tout de même pas abîmer ce qui brille...

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Commentaires
L
Ah ah ah! ça me fait bien poiler tout ça! Ancien adepte de la secte des dépressifs farmeriens, je dois dire que je retrouve certaines de mes réflexions dans ce que tu as écrit! Dieu merci, j'ai été repêché de la noyade, même si Cher ou Blondie ne sont peut-être pas mieux! Mais, plus marrantes en tout cas! Bref, prépare-toi quand même à avoir un déferlement Farmerien ds les jours qui suivent avec la sortie de son prochain album tant attendu et ses concerts pour 2006!!! Ah ah ah, on a pas fini de se bidonner et d'en entendre parler!<br /> P.S : tu sais que tu risques de t'attirer les foudres des plus fervants fans et de te retrouver en guépière farmerienne sur le bûcher des méchants invertis, avec ce que t'as balancé! ;-)
S
scuse moi, j'aime bien ecouter du mylene, mais je suis pas homo (enfin j'en sais rien) ... mais bon, a la place d'un pagny qui est dans les affires judicaires, les staracademiciens qu'on entend sans cesse ou des chanteuses criardes on en manque pas) je la trouve honete moi :)
M
Je partage tout a fait ton avis, et ne comprends pas du tout cet engouement... Cette femme, c'est le règne du faux sous toutes les formes, les coutures...
W
Quelle critique acide ! Félicitations ! :)
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