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Journal de l'autre bord
18 janvier 2004

Une belle chose

Un peu le fruit du hasard que cette soirée de 2001 sur Arte. Moi, si peu versé par la télé, qu'allais-je donc faire devant mon aquarium aux reflets bleutés alors que l'urgente préparation de mon déménagement se faisait pesamment sentir ?

Bien m'en prit en réalité puisque je vis ce jour-là un film qui allait (r)éveiller en mon âme des souvenirs difficiles.

A beautiful thing, conte superbe et juste, ou comment appréhender en pleine adolescence, en pleine quête de soi, ce qui semble devenir une orientation non-conventionnelle sinon embarrassante.

Parce que, cela va sans dire, se savoir différent, se faire payer de sa tête une vie durant pour ne pas être virilement identifié, gérer ses attirances comme de saints et honteux secrets, jongler tout autant avec des penchants tout ce qu'il y a de plus normal (le bizarre paradoxe de la bisexualité), c'était une mission quasi impossible pour moi. Et, là-dessus, telle une ultime épreuve, l'inadéquation de mon être profond avec les profondeurs d'un Dieu bien exigeant...

Non, décidément, se découvrir tellement différent et ne savoir ni à qui l'exprimer ni comment le dire, voilà bien une chape qui écrase de son indomptable puissance la légèreté insouciante de ce bel âge. J'ai subi tout cela, et même le reste, dans la certitude détestable que cette possibilité d'un autre moi serait l'assurance sur ma mort si je devais ne serait-ce qu'évoquer à demeure un trouble en mon for intérieur.

Irréligieux, évidemment contre-nature, obscène, tellement inconfortable au regard des autres, tellement objet de honte et de dégoût, qui de ma mère ou de mon beau-père aurait le plus souhaité me voir disparaître dans des flammes punitives si seulement si...?

De ces petits esprits insupportables, bêtement machistes ou connement pseudo-bourgeois, de ces manques d'amour indécents, de cet instinct de destruction massive de l'autre, de cet endoctrinement sectaire, de toutes ces choses-ci, quel fut le pire des maux ?

Je n'en sais fichtre rien et ai peine à me souvenir de ces moments où je savais n'être que tout seul dans mon no man's land, bout de terre ingrate où il faudrait, par dessus tout, se cacher et s'empêcher d'exister selon un simple ressenti...

Quelle mère, quelle chair d'une autre chair (qui sait ?) déchue pourrait se comporter comme Sandra envers Jamie ? Le véritable amour, celui qui accepte de bousculer ses petites habitudes, quoi que parfaitement accessible, n'est pourtant pas donné à tout un chacun. Voilà quelque chose de bien dommage ; cela éviterait force drames de toute une vie.

J'ai donc revu cette ode à la différence. Et, une fois de plus, elle me bouscule, me rappelant qu'au delà de l'imagerie, pas même d'Epinal, de ces univers mâles qui dégoûtent si souvent, il peut malgré tout exister une véritable sensibilité, un profond attachement à un alter ego, un autre garçon, exempt de la recherche effrénée de ces plaisirs.

Du coup, je vais y croire encore un temps...

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