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Journal de l'autre bord
8 janvier 2004

Versus

J'ai toujours eu une sacro-sainte horreur du conflit.

Effectivement, je ne sais obstinément pas exister dans le malaise avec l'autre, la mésentente, ou le combat. Alors, souvent, longtemps, énormément, je prends sur moi, je m'efface, je me pince, pour ne pas envenimer la chose, pour ne pas me faire remarquer, moi, le discret, le gentil garçon tellement bien élevé, policé comme un bataillon de quatorze juillet. Au risque d'avoir la sensation, parfois, de passer pour un aimable crétin.

Mes mises au point avec les gens sont par conséquent on ne peut plus rares ; elles doivent concrètement se compter sur les doigts de la main d'un menuisier malhabile. Pourtant, il arrive quelquefois où, comme un challenge, je me fixe l'objectif d'exister et de faire connaître ce que je ressens, ce qui me blesse, ce qui décemment ne convient pas, pour de citoyennes raisons ou des motifs professionnels.

En temps normal, une fois de plus, une fois encore, j'aurais laissé coulé. Sauf que, à n'y prendre garde, à ne point lever barrière, l'on risque de se retrouver tondu un jour d'hiver avec ces petits arrivistes qui sont prêts à vous manger dans la main pour mieux vous bouffer ensuite la laine sur le dos.

La Comperette, quoi qu'au demeurant a priori fort sympathique, est de cet acabit : les dents longues, l'orgueil itou et le vice certain. Alors, se faire sauvagement contrôler par une de ses pairs, jeune subordonnée trop ambitieuse, loup déguisé en oie blanche dandinante, et s'entendre dire que, accessoirement, on lui devrait quelques arrangements avec le ciel, dont elle se targuerait d'ailleurs et fort volontiers d'être la fille légitime, c'est véritablement de trop. Et cela agace tout le monde. Or, comme le veut la nature humaine, bavarde et revendicatrice, on vire aussitôt dans le gargarisme, la critique systématique de l'agent double, on se monte, on se fait mousser, on explose... Rien de sain, rien de noble. Il valait mieux s'affirmer, faire impérieusement cesser cette dérive en eaux troubles, histoire de bien faire comprendre que ce n'est pas parce que l'on est de bonne consistance que l'on en devient con au point de ne se rendre compte d'aucun abus.

J'ai souhaité être calme, espéré discuter ; cela s'est passé différemment, dans une mauvaise foi évidente. Bien mal lui en a pris : j'ai hurlé, abandonnant mes souhaits d'affaires réglée à l'amiable, dans la discrétion et le respect. C'est tant pis, tant mieux après tout : les choses sont claires désormais. Inamicales mais claires.

Voici alors que je ne serai plus le con de service, l'enfant faible qui se voit toujours être sous la férule de ces adultes trop entreprenants, ne reculant devant rien, m'étouffant de leur assurance à toute épreuve et de leur carriérisme blindé.

J'ai grandi, je m'affirme dans le pouvoir de dire "merde" sans les fleurs d'usage. C'est là un petit pas qui a pour moi une importance hautement symbolique. Ce soir je le fête en lui portant un toast.

 

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